Tu as ce léger sourire, ces mains tremblantes, l’impression trop grande d’avoir mal joué. Tu te dis que pour une fois, tu l’as écouté, et que tu n’es pas certain de savoir où tout ça allait réellement te mener. Tu te dis que c’est peut-être la dernière fois que tu la vois, aussi. C’est la dernière fois, parce qu’enfin, tu l’avais écouté. Parce que cette fois-ci, tu venais réellement de damner toutes tes libertés. Tu l’as écoutée, et finalement, tu crains un peu l’endroit où ça va te mener. Peut-être que tu avais bien fait de croire en elle. Peut-être que ça allait réellement t’aider. Et si elle s’était trompée ? Si elle s’était trompée, il ne te restait plus que tes yeux pour pleurer. Peut-être qu’encore une fois, tu n’aurais pas dû l’écouter. Peut-être que tu aurais dû oublier ses folles idées. Mais tu ne pourras pas constamment rejeter l’aide qu’on voulait bien t’apporter. Peut-être était-ce ce qui t’avait fait flancher. Tu as regardé l’immeuble avec une certaine nervosité. Et tu t’y es glissé, te fondant dans l’ascenseur. Tu es un peu à la bourre, comme toujours. Disons que c’est déjà ça. Disons que pour une fois, t’es là. Que tu n’as pas oublié le rendez-vous qui devrait compter tant pour toi. Et tu t’es présenté à l’accueil, comme à chaque fois. Avant d’aller t’installer sur une chaise en plastique, ta casquette entre les doigts. Comme ça, à te perdre sur la petite musique qui résonnait. Mélodie commerciale, tu ignores plus ou moins de quoi il s’agit. Tu n’as pas vraiment envie.

Lorsque tu as entendu la porte s’ouvrir, ton nom résonner, tu t’es levé. Ta casquette est tombée au sol. « Bonjour .. » Tu as maladroitement marmonné, avant de te pencher pour ramasser ton couvre-chef. Tu es troublé. Tu es en sueur et tout tremblant. Tu es entré dans la pièce, sans trop hésiter. Tu essaies de te dire qu’elle va être fière de toi, que pour une fois, tu as fait un bon choix. Que tu l’as écouté, pour tenter de te sortir de là. Mais tu te souviens de ses propos. En dernier recours. Si tu ne peux pas tomber plus bas. C’est que tu t’y sentais, au fond du trou. Profondément emmuré, disparu, englouti par cette étrange société. Alors tu as fait ce qu’elle t’avait conseillé. « J’me suis vendu. » Tu l’as déclaré, alors que tes fesses venaient à peine de se poser sur le siège. « Tu ne pourras pas dire que cette fois-ci, j’t’ai pas écoutée, hein. » Tu as doucement chuchoté tes mots. Tes yeux restent fixés un long moment sur le bureau. Tu as porté ta main à ta bouche. Pour te ronger les ongles. Tu es mal à l’aise, dans le fond. Fier quelque part, mais mal dans ta peau.

Est-ce qu’en agissant ainsi, tu avais voulu la défier ? Est-ce que c’était ton but, en réalité ? Avais-tu voulu lui montrer que tu n’étais plus un enfant dépendant ? Tu ne sais pas. Au fond, c’est bien confus, tout ça. Peut-être que tu en avais eu ras-le-bol de tout ça. D’entendre que si tu ne l’écoutais pas, tu ne t’en sortirais pas. Alors tu as suivi ses conseils, pour une fois. Pour la dernière fois. « Mais c’était ce qu’il restait à faire, n’est-ce pas ? Sinon, tu ne m’aurais pas proposé ça .. » Tu aimerais être sûr de toi. Juste cette fois. Retrouver ce semblant de confiance en toi. Tu ne te sens pas à blâmer, n’est-ce pas ? Si ça, t’arrive, c’est juste de ta faute à toi. Et toutes les questions se mélangent dans ta tête perdue. Et maintenant, Pandore, on fait quoi ?